THE ROCKY HORROR PICTURE SHOW
de Jim Sharman
Avec Susan Sarandon; Barry Bostwick; Tim Curry; Richard O’Brien; Meatloaf; Patricia Quinn; Little Nell; Charles Gray; Johnathan Adams
Musique: Richard O’Brien
Arrangement musical: Richard Hartley
Genre: Comédie musicale fantastique(ment culte)
USA - 96 minutes - 1975
Distribué par PFC vidéo
Sortie DVD zone 2: 21/02/2001
Brad et Janet (Barry Spin City Bostwick et Susan Sarandon) sont jeunes, beaux, candides et viennent de se déclarer leur amour mutuel lors d’un mariage auquel ils ont assisté. Roulant tout deux en voiture dans la direction d’une belle idylle, ils tombent en panne et se réfugient dans un lugubre château en vue de téléphoner à un dépanneur. Mais le maître des lieux, le transsexuel fou Frank’n’Further, va leur faire passer une nuit qu’ils n’oublierons jamais. En effet, se prenant pour le docteur Frankenstein, il fabrique un culturiste blond, non pour se prendre pour Dieu, mais pour assouvir ses fantasmes homosexuels. Lancés dans un tourbillon orgiaque où tout le monde semble sortir d’un asile psychiatrique tenu par le fils caché de David Lynch et Pedro Almodovar, Brad et Janet vont tenter de survivre à cette quête initiatique horrifique.
RETOUR DANS LE PASSE
Il y a vingt cinq ans sortaient sur les écrans, de façon quasi-simultanée, deux ovnis cinématographiques qui allaient, à eux seuls, représentés un genre, alors tombé en désuétude, la comédie musicale. Ces deux films se nommaient Phantom of Paradise et The Rocky Horror Picture Show. Leur particularité principale fut de se fonder sur le patrimoine fantastique et de créer un authentique melting pot culturel. Seulement là où le premier intégrait les numéros musicaux dans l’intrigue (ex: lors de passage sur scène ou de session d’enregistrement) le second prenait le parti d’en faire des scènes de dialogues chantés. C’est sûrement à cause de cette différence finalement majeure que les chansons du Rocky sont restées dans les annales du septième art. Car, en mettant en avant les numéros musicaux comme la base de l’histoire et des caractéristiques des personnages (chansons délicieusement niaises pour Brad et Janet; rock suave pour Frank’n’Further et pop rock pour Meatloaf), les auteurs ont tout bonnement créé des morceaux de bravoure orchestrés. Suite à la vision du film, difficile, en effet, de ne pas refaire quelques pas, hilare, comme le Time Warp ou de conserver la classe majestueusement décadente de Tim Curry en Sweet Transvestite. Essayez, vous verrez bien. Mais, attention plus on connaît le film, plus il devient impossible de se contrôler.
Cependant, remontons un peu les années. A l’origine du Rocky, il y a une pièce de Richard O’Brien qui, bien que dans l’air du temps (mélange très Woodstock de musique et de propos sur la libération sexuelle), peut être considérée comme un évènement novateur car, au lieu de faire table rase du passé, elle se sert de ces références pour recréer un monde. Un monde qui se cherche une nouvelle identité (sexuelle, politique, musicale et artistique) en élargissant des valeurs traditionnelles désormais trop réductrices. L’intelligence du Rocky est donc de faire passé un discours sur la tolérance en parodiant les clichés chers au film classique hollywoodien. Par exemple, vu au travers de ce prisme distordu par la modernité de la mise en scène, Brad et Janet, vrais stéréotypes du couple bien pensant tout droit issus de la famille Ingles (Oui, oui, celle de La Petite maison dans la prairie), nous paraissent outrageusement dépassés et naïvement crétins. Richard O’Brien doit encore bien se marrer d’avoir réussit à mettre un gros coup de pied dans le derrière symbolique des lecteurs de la collection Arlequin.
UNE MESSE POUR FRANCK’N’FURTHER
D’ailleurs, on peut encore se demander comment un projet comme le Rocky a put avoir l’approbation d’un gros studio comme la Twentieth Century Fox. Car, on ne peut pas dire que les oeuvres parlant et montrant l’homosexualité, la transexualité, la nécrophilie (la création de Franck’n’Further renaît d’entre les morts après tout) et tout ça en musique, soient courantes. La seule explication semble la prévision d’un gros succès culte formé par les fans, déjà nombreux, de la pièce à Broadway. Et, pour un bon calcul, s’en est un! Un quart de siècle a passé et ceux qui n’ont jamais entendu parlé au moins une fois du Rocky doivent débarquer de la planète Mars.
En un peu plus de deux décennies rien n’a changé. Plusieurs fois par semaine, au quatre coins du globe, des personnes sains de corps et d’esprits, riche ou pauvres, jeunes et vieux, se rendent dans des salles projetant le film. Habillés comme leur personnage favori, ils vont revivre, au rythme de la projection, les scènes du films et transforment, le temps d’une heure et demi, une oeuvre pelliculée en véritable religion. Plus qu’une référence, le Rocky Horror Picture Show est donc légitimement devenue une expérience expiatrice des frustrations de chacun. Il recouvre alors la fonction première (et quasiment oubliée) du carnaval: celle de fêter la différence. Quoi de mieux pour faire un film unique.
LE CULTE DU BONUS CULTE.
A l’occasion de l’anniversaire de The Rocky Horror Picture Show (25 ans déjà), PFC nous a gâté et nous a préparé une édition collector à la Fight Club (2 disques sérigraphiés dans un superbe coffret illustré et cartonné) on ne peut plus approprié au statut culte de l’œuvre. Il semble en effet que la majorité des suppléments est été mis pour entretenir l’aura, à présent historique (pour le cinéma), du film de Jim Sharman et Richard O’Brien.
Mais allons à l’essentiel et parlons un peu de ce que nous réserve le premier disque:
- Le très beau menu du DVD, animé avec les jambes musclées de Franck’n’Further!
- Le film, évidemment. Mais dans son meilleur pressage. On peut donc admirer le soin apporté à chaque détail et en particulier au décors qui mêlent allègrement la décadence mégalomaniaque de Franck’n’Further (inspiration Romaine) et l’architecture Victorienne type Hammer Film. Avec, au choix, format 16/9 ou 4/3 (pour du 1/85) et un son (anglais uniquement, mais avec des sous titres français, Anglais, Grec ou Hollandais) d’une clarté hallucinante en 5.1 et 2.0.
- Le commentaire audio de Richard O’Brien et Patricia Quinn (les deux serviteurs de Franck’n’Further). En les écoutant, on se rend compte combien le Rocky, même en film, est le bébé de Richard O’Brien tant il connaît les moindres détails de fabrication de son adaptation. Sinon, après un début de commentaire intéressant mais un peu creux, les deux comparses semblent retrouver leur complicité d’antan et nous éclairent sur quelques points passionnants (par exemple, le fait que Magenta et Columbia était à l’origine un seul personnage) ou anecdotiques mais drôles (la fameuse gestuelle des coudes entre serviteurs assimilés, par les fans, à un accouplement).
- Une fonction prompteur qui permet d’avoir les indications sur l’écran pour refaire, chez vous, les rites des spectateurs du Rocky (jeter du riz pendant la scène du mariage, ...).
- La vision du film avec, en fond sonore, les réactions encore trop discrète du public (plutôt sympa comme idée, non?) avec en préambule, la courte présentation de l’œuvre dans une salle, bourrée de fans, par le président du club, Sal Piro.
- Une version cachée, en noir et blanc, du film comme le voulait initialement Jim Sharman.
Vous n’etes pas rassasiez de pop rock, il vous en faut un peu plus, heureusement que le second disque est là, alors. On n’y trouve pêle-mêle:
- Une scène coupée où Janet voit, sur un écran de contrôle, son Brad tout juste sorti du lit de Franck’n’Further et chanté son amour pour elle (l’honneur est sauf et la chanson mignonnette).
- Des prises du films non mixées avec, parfois des plans inédits. On découvre, en les visionnant, comment le Rocky serait une oeuvre tragique (ne riez pas!) sans les chansons, faisant ainsi ressortir l’avant gardisme de la mise en scène.
- Le passage avec Meatloaf, Hot Patootie, avec divers incrustations d’infos et de dessins potaches, malheureusement uniquement en anglais.
- Les deux bandes-annonces qui préviennent soigneusement le public de ce qu’il risque de voir.
- Pour les tordus, sont présentes les versions karaoké de Touch-a Touch-a Touch-a Me (dommage que le touchorama n’existe pas!) et de Sweet Transvestite.
- Des interviews des principaux acteurs (plus de 50 min, mais sans Tim Curry. Ou es tu ?)
- Et enfin un superbe documentaire, Le Rocky Horror double feature Video Show.
Bon et bien, si vous aimez le cinéma et la musique. Si vous êtes curieux. Si vous n’avez pas vu le Rocky Horror Picture Show, ce magnifique coffret fera de vous une encyclopédie de tout ce qui concerne le mythe et exaucera tout vos souhaits (sens du rythme dans vos déhanchement en boite, richesse, succès amoureux, ...). Quand a ceux qu’ils l’ont vus, je suppose que le coffret trône déjà au dessus de la cheminée ou dans votre laboratoire.
Note film: 6/6
Note DVD: 5,5/6
Yann RKO Moreau